Voici un texte de Fabien Deglise tiré du site web du journal LE DEVOIR, que j’ai découvert sur le blogue de PakBek, un blogue qui vise à vous maintenir informés sur les nouvelles tendances en matière de bioplastiques, d’emballages éco-responsables, d’emballages actifs et d’emballages intelligents.
L'un semble venir forcément avec l'autre. Dans les deux dernières années, l'offre de produits se drapant dans le vert pour séduire les consommateurs a connu une croissance exceptionnelle dans les commerces de détail au Canada et aux États-Unis. Mais ce qui devrait être une bonne nouvelle pour les adeptes de l'écologisme à tout crin n'en est finalement pas une.
Pour cause. 98 % de ces produits portent une tare bien de notre temps: ils pratiquent le lavage vert -- greenwashing, comme disent les esprits critiques vivant de l'autre côté de la rivière des Outaouais. Le lava quoi? Lavage vert, ou l'art de se montrer socialement et écologiquement responsable, même si ce n'est pas totalement vrai.
Sceptique? Pas convaincu? C'est pourtant l'organisme TerraChoice Environmental Marketing qui se charge une fois de plus de cette douloureuse dénonciation. Depuis 2007, ce groupe de consultants passe au crible, annuellement, le monde de la marchandisation de l'écologisme afin d'en décoder les bonnes mais aussi les mauvaises pratiques, qui, avec 98 % -- ça, c'est 100 % moins 2 -- semblent assez généralisées, merci.
Entre novembre et janvier dernier, les limiers de TerraChoice ont analysé un peu plus de 2200 produits verts dits de consommation courante vendus dans les magasins d'ici et des États-Unis. En substance, ils ont mis la main dans les couches-culottes (propres!), le dentifrice, les crèmes pour le corps, les jouets, les produits d'entretien, les fournitures de bureau ou encore les matériaux de construction. Entre autres.
Ces produits étaient porteurs d'espoir et de bonne conscience pour leur clientèle cible, mais surtout d'environ 5000 allégations à saveur écolo, indique le rapport intitulé Les sept pêchés du lavage vert/Allégations environnementales sur les marchés de la consommation, que le groupe vient tout juste de rendre public.
Et malheureusement, la quasi-totalité de ces prétentions n'a pas résisté au jeu de la vérification des faits. Les règles n'étaient pourtant pas très sévères. TerraChoice s'est basé sur la norme ISO 14021 en matière d'étiquetage environnemental et s'est fié aussi aux lignes de conduite que se sont données la US Federal Trade Commission, le Bureau de la concurrence du Canada et l'Australian Competition & Consumer Commission.
Pis, le groupe qui avait défini par le passé six péchés de lavage vert, soit six bonnes manières de bien tromper ses clients en leur faisant prendre des vessies pour des lanternes vertes, vient, au regard de cette enquête annuelle, d'en ajouter un septième: le «péché d'adoration de la fausse étiquette». Répandu chez plusieurs distributeurs canadiens, souligne TerraChoice, le stratagème consiste à apposer sur un produit un logo qui s'inspire fortement et/ou grossièrement de ceux émis par de véritables organismes de certification du développement durable.
Bien sûr, ce logo ne veut rien dire, ne s'appuie sur aucun système de contrôle et brille simplement sur l'emballage dans le but de duper les consommateurs. Un quart des produits analysés commettait cette offense divine dans les temples de la consommation, indique le rapport. Sombre époque.
Les autres produits, eux, n'étaient pas en reste puisqu'ils ont fait vibrer, en 2008, au moins une des six cordes des autres péchés du marketing vert tels que définis par l'organisme. En tête de liste, le «péché du compromis caché» qui consiste à mettre de l'avant les bienfaits écologiques d'un produit pour mieux occulter un ou des effets pervers du même produit sur l'environnement. Un papier issu d'une forêt gérée dans une optique de développement durable reste un papier pour lequel il faut couper des arbres.
Le péché d'absence de preuve arrive ensuite. Tout ce qui prétend «combattre le réchauffement climatique» entre certainement dans cette catégorie. Idem pour les produits qui prétendent contenir des matériaux post-consommation recyclés, sans toutefois fournir trop de détails sur cette contenance, ont constaté les enquêteurs de TerraChoice. Pour vendre le vert, «l'imprécision» est aussi une arme redoutable -- et le troisième péché en importance: le concept du «tout naturel» que l'on croise souvent sur les étiquettes en est une belle illustration. Surtout quand on se souvient que l'arsenic, l'uranium, le mercure ou encore le formaldéhyde sont des substances naturelles extrêmement dangereuses pour la santé.
Vient ensuite l'offense de la non-pertinence, commise lorsqu'on souligne dans un produit l'absence d'une substance dont l'usage est de toute façon interdit par la loi à la grandeur du pays. C'est le cas par exemple des chlorofluorocarbures (CFC). Le «péché du moindre des deux maux» a aussi ses adeptes et consiste à donner du lustre vert à un produit qui, malheureusement, ne pourra jamais en avoir. Il est question ici de cigarettes biologiques, ou encore de véhicules utilitaires sport (VUS) qui prétendent être recyclables à 95 % après 15 années de production de gaz à effet de serre sur les routes.
Enfin, moins répandu mais tout de même présent, le «péché de fabulation» complète cette longue liste de la duperies. Particulièrement vicieux, il se matérialise sur des produits qui se disent biologiques sans avoir de certification officielle ou encore qui disent se conformer à la norme Energy Star, sans preuve. Il prouve aussi, avec la ribambelle d'autres insultes à l'intelligence des consommateurs, que si le marché des produits verts est bel et bien en croissance, de 79 % entre 2007 et 2008, estiment les auteurs du rapport, celui de la supercherie verte continue de bien se porter, merci. Et, quoi qu'en disent les marchands de rêves et autres exploiteurs de tendances, ce n'est certainement pas la planète qui va le plus en profiter.